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Précision de jurisprudence quant à la qualification des faits de « harcèlement moral » par le salarié

Précision de jurisprudence quant à la qualification des faits de « harcèlement moral » par le salarié

Publié le : 20/05/2023 20 mai mai 05 2023

Aux termes d’un arrêt rendu en formation plénière le 19 avril 2023, la chambre sociale de la Cour de cassation décide que « le salarié qui dénonce des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, peu important qu'il n'ait pas qualifié lesdits faits de harcèlement moral lors de leur dénonciation, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu'il dénonce. (…) »

Par cet arrêt, la Cour de cassation précise sa jurisprudence afférente à la protection du salarié contre le licenciement tiré d’un grief de dénonciation de faits de harcèlement.
Selon une jurisprudence établie au visa des articles L. 1152-1 et L. 1152-3 du code du travail, « le salarié qui relate des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, [...] laquelle ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu'il dénonce » (en ce sens notamment :  Soc., 7 février 2012, pourvoi n° 10-18.035, Bull. 2012, V, n° 55).
Il est tout aussi établi que le grief énoncé dans la lettre de licenciement tiré de la relation par le salarié de faits de harcèlement moral emporte à lui seul la nullité du licenciement (voir notamment  Soc., 10 juin 2015, pourvoi n° 13-25.554, Bull. 2015, V, n° 115.).
Cependant, l’immunité́ accordée au salarié avait été réservée à une seule hypothèse : celle où le salarié avait expressément qualifié les faits de « harcèlement moral » dans l’écrit qui lui était reproché par la lettre de licenciement ( Soc., 13 septembre 2017, pourvoi n° 15-23.045, Bull. 2017, V, n° 134).
La Cour de cassation revient aujourd’hui sur cette solution, pour les motifs suivants.
Depuis un arrêt du 16 septembre 2020, « l’absence éventuelle dans la lettre de licenciement de mention de la mauvaise foi avec laquelle le salarié a relaté des agissements de harcèlement moral n'est pas exclusive de la mauvaise foi de l'intéressé, laquelle peut être alléguée par l'employeur devant le juge ».
Dès lors que l’employeur a la faculté d’invoquer devant le juge, sans qu’il soit tenu d’en avoir fait mention au préalable dans la lettre de licenciement, la mauvaise foi du salarié licencié pour avoir dénoncé des faits de harcèlement moral, il était naturel par souci d’équilibre que la Haute Cour précise sa jurisprudence et autorise désormais salarié à se prévaloir de la protection contre le licenciement, quand bien même il n’aurait pas utilisé les mots « harcèlement moral » pour qualifier les faits dénoncés.

Cette solution est encore cohérente avec la ligne jurisprudentielle clairement fixée par un récent arrêt du 16 février 2022, aux termes duquel « sauf abus, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression, à laquelle seules des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent être apportées », de sorte que « le licenciement prononcé par l'employeur pour un motif lié à l'exercice non abusif par le salarié de sa liberté d'expression est nul ».

Cet arrêt apporte donc une précision importante et invite les juges du fond à vérifier en tout état de cause toute dénonciation de harcèlement élevée par le salarié, nonobstant les mots employés dans la dénonciation.
 

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