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À la recherche d’une définition de l’influenceur.seuse

À la recherche d’une définition de l’influenceur.seuse

Publié le : 23/05/2022 23 mai mai 05 2022

Les influenceur.seuse.s., omniprésent.e.s sur les réseaux sociaux, sont les nouvelles « stars » de cette génération. Les marques, intéressées par leur capacité de persuasion, ont de plus en plus recours au marketing d’influence afin de promouvoir leurs produits et services. Ce marché, en croissance constante, représente aujourd’hui 13,8 milliards de dollars, soit 20 fois plus qu’en 2015.

Afin de comprendre le phénomène du marketing d’influence, il est important de définir la notion d’influenceur.seuse (I), avant la distinguer de l’activité de mannequin ou de celle de Youtubeur (II).
 
    1. La définition de l’influenceur.seuse 

1.1 Une absence de définition légale …

Alors que les notions de mannequins (article L.7123-2 Code du travail) et d’artistes-interprètes (article L.212-1 Code de la propriété intellectuelle) sont définies par la loi, il n’existe pas de définition légale de l’influenceur.seuse. Et pour cause, l’influence est une création de la pratique, qui n’a pas encore été formalisée par le législateur.

Si la notion d’influence peut paraître nouvelle, elle est en réalité née d’une étude de 1940, réalisée par Paul Lazarsfeld, s’intéressant à l’influence du réseau amical ou familial de l’individu dans ses votes. 

Aujourd’hui, le terme d’ « influence » n’est plus utilisé dans le même contexte, et n’a cessé d’évoluer avec le temps.

À l’origine, afin de promouvoir leurs produits ou services, les marques avaient coutume de faire appel à des célébrités de tous milieux (sportifs, mannequins, acteurs etc.) de manière à profiter de leur notoriété.

Désormais, le phénomène est inversé : ce ne sont plus les marques qui font appel à des célébrités mais ce sont ces dernières qui proposent directement leurs services.

Depuis l’avènement des réseaux sociaux, la célébrité s’apprécie en « followers » et est totalement détachée de la personne. À partir du moment où l’influenceur.seuse a un nombre important d’abonnés, il.elle va proposer son réseau aux marques, à l’instar d’un prestataire de service.

1.2 … comblée par une définition de la pratique

Afin de pallier le vide législatif, les professionnels ont tenté de définir la notion d’influenceur.seuse.

L’Autorité de régulation professionnelle de la publicité propose de définir l’influenceur.seuse. comme un.une « individu exprimant un point de vue ou donnant des conseils, dans un domaine spécifique, et selon un style ou un traitement qui lui sont propres et que son audience identifie. Un influenceur peut agir dans un cadre purement éditorial, ou en collaboration avec une marque pour la publication de contenus (placement de produits, participation à la production d’un contenu, diffusion d’un contenu publicitaire etc.) ».

De cette définition, il résulte que l’influenceur.seuse. se distingue des autres professionnel.le.s du marketing présent.e.s sur les réseaux sociaux, son influence étant évaluée en fonction de son nombre d’abonné.e.s : plus l’influenceur.seuse. a des « followers », plus il.elle sera réputé.e performant.e pour vendre un produit ou un service.

Un colloque du Centre d'Etudes Internationales de la Propriété Intellectuelle (CEIPI) classe d’ailleurs les influenceur.seuse.s. selon leur nombre d’abonné.e.s :
 
  • Un « nano-influenceur » a entre 500 et 5.000 abonnés
  • Un « micro-influenceur » a entre 5.000 et 30.000 abonnés
  • Un « macro-influenceur » a entre 30.000 et 700.000 abonnés
  • Une célébrité a 700.000 abonnés ou plus

L’influenceur.seuse étant qualifié.e ainsi pour ses qualités et sa notoriété, il est légitime de se demander ce qui différencie cette activité d’autres professions connexes, telles que celle de mannequin, ou encore de Youtubeur.
 
    1. La distinction de la notion d’influenceur.seuse avec des notions connexes

2.1) L’activité de mannequin

L’article L.763-1 Code du travail définit le.la mannequin comme « toute personne (…) chargée (…) de présenter au public (…) par reproduction de son image (…) un produit, un service ou un message publicitaire (…) même si cette activité n’est exercée qu’à titre occasionnel ».

Des points communs …
   
  • De même, à l’instar du mannequin, l’influenceur.seuse peut avoir pour seule activité la présentation au public d’un produit ou d’un service par reproduction de son image, par exemple pour vanter les mérites d’une marque dans un magazine :
     

(N.B: l’illustration ci-dessus reproduite est celle d’une influenceuse exerçant ici ponctuellement et contrairement à son habitude l’activité de mannequin pour un magazine -  
Source : https://www.elle.fr/People/La-vie-des-people/News/Lena-Situations-dans-les-coulisses-du-shooting-des-trois-couvertures-de-ELLE-3932542 )




… donc attention au risque de requalification

Contrairement à celle d’influenceur.seuse., l’activité de mannequin est définie et réglementée par la loi.

Dès lors, si l’activité exercée par l’influenceur.seuse. répond aux conditions posées par l’article L.763-1 du Code du travail, le juge sera enclin à requalifier l’influenceur.seuse en mannequin, avec plusieurs conséquences :
 
  • Le Code du travail impose le statut de salarié au mannequin (article L.7123-3 du Code du travail). Un mannequin ne peut donc pas avoir un statut indépendant. Or, l’influenceur.seuse exerce généralement en qualité de prestataire de service, rémunéré.e non pas par bulletin de paie mais sur facture établie par ses soins.
  • Le placement d’un.une mannequin auprès d’un annonceur par une agence exige de justifier de la licence d’agence de mannequin (article L.7123-11 Code du travail). Le recours à une agence de mannequin sera donc indispensable en cas de placement d’un.e influenceur.seuse requalifié.e « mannequin » par un Juge, sous peine de répondre de l’infraction d’exercice illégal de l’activité d’agence de mannequin.

En cas de litige, un risque de requalification par le Tribunal saisi existe donc, mais interviendra seulement si l’activité de l’influenceur.seuse. consiste exclusivement dans la mise à disposition son image, en posant pour un magazine par exemple, à l’exclusion de toute autre prestation (texte, paroles, chant, scénario pour vanter les mérites d’une marque, etc.)

Or, les marques n’ont pas recours à l’influenceur.seuse. uniquement pour bénéficier de son image et de sa notoriété. Elles comptent également sur son pouvoir de persuasion : ses « followers » lui accordent une certaine confiance et il.elle peut, de ce fait, influencer les comportements de consommation de ses abonnés.

 
    1. L’activité de Youtubeur

Même s’il n’existe pas de définition légale, le.la Youtubeur.euse. est couramment considéré.e comme une personne publiant des vidéos plus ou moins longues, suivant une thématique ou non, sur son compte YouTube.

En cela, l’influenceur.seuse. qui publie des vidéos sur YouTube peut également être Youteubeur.euse. Réciproquement, le.la Youtubeur.euse. dont l’image est utilisée dans un but mercantile, pour influenceur les gens qui le.la suivent à acheter un produit, répondra nécessairement à la définition d’influenceur.seuse.

Toutefois, un.e Youtubeur.euse. n’exerce pas nécessairement une activité d’influenceur.seuse. Un.e. Youtubeur.euse. peut réaliser des vidéos uniquement pour le plaisir de créer et de partager, sans rechercher un quelconque but lucratif.

Réciproquement, les influenceur.seuse.s. privilégient de moins en moins le recours à YouTube, leurs supports de prédilection étant Instagram et TikTok. Et pour cause, la plateforme YouTube propose une multiplicité de format (les vidéos longues, courtes, les longs-métrages, la « story », le « short »), tandis que le format sur TikTok et Instagram est unique : l’influenceur.seuse. peut seulement créer des photos ou des vidéos courtes.

Or, les internautes préfèrent désormais consommer les vidéos et privilégient les formats très courts, ce qui a été vite compris par Instagram et TikTok. Sur ces plateformes, les vidéos ne dépassent pas les 2 minutes. Ce temps restreint invite l’influenceur.seuse. à rationnaliser ses efforts et maximiser son impact pour en un minimum de temps divertir son public, capter son attention et présenter le produit, objet du partenariat.
 
(N.B. : La capture-écran ci-dessus produite est celle d’un tiktokeur renommé présentant ici d’une marque de produits alimentaires pour en vanter les mérites et en augmenter les ventes).


En synthèse, l’influenceur.seuse. se distingue du mannequin ou du Youtubeur principalement du fait de son activité de marketing digital.

L’influenceur.seuse., qu’il.elle crée.e pour son compte uniquement, ou en collaboration avec une marque, va réaliser un contenu divers : publication d’un texte court, d’une vidéo courte ou d’un contenu plus élaboré (vidéo, photos, post).

Certains contenus peuvent même constituer des « œuvres de l’esprit » protégées par le droit d’auteur.

L’influenceur.euse peut donc avoir bien des cordes à son activité, y compris celle d’auteur…avec les conséquences (importantes) en droit y afférentes.


Article écrit par Nadine Bitar
 

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